Du nouveau sur le front de la mise en œuvre de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages du 8 août 2016 (ci-après la « loi biodiversité »).
Celle-ci prévoyait, dans son article 37, l’introduction de l’Article L. 412-18 du Code de l’environnement, selon lequel les utilisateurs de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées doivent présenter à la ou aux autorités compétentes les informations prévues à l’article 4 du règlement (UE) n° 511/2014 du 16 avril 2014 :
- lorsqu’ils reçoivent un financement pour des travaux de recherche impliquant l’utilisation de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques, et
- lors du développement final d’un produit élaboré grâce à l’utilisation de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques.
En outre, lorsque cette utilisation conduit à une demande de brevet, les informations en question doivent être adressées à l’Institut national de la propriété industrielle à la seule initiative du déclarant. L’Institut national de la propriété industrielle procède aux démarches normales de l’examen de la demande de brevet et à l’attribution d’une date de dépôt et transmet les informations sans examen à l’autorité compétente.
La décision n°2017-105 du 24 juillet 2017 du Directeur général de l’INPI vient désormais préciser quelles sont les modalités de transmission de ces informations.
Il convient ainsi que les utilisateurs présentent les informations sous la forme d’une déclaration faite au moyen du modèle figurant à l’annexe III du règlement d’exécution (UE) 2015/1866 et que cette déclaration soit envoyée au format pdf par courrier électronique à l’adresse nagoya@inpi.fr. Plus d’informations sont disponibles sur ce lien.
Cette décision appelle deux commentaires de notre part.
1. Le premier concerne le moment où il convient de transmettre la déclaration.
En effet, ni l’Article L. 412-18 du Code de l’environnement, ni la décision du Directeur général de l’INPI, ne prévoient de délai pour procéder à la déclaration.
Il pourrait sembler a priori qu’il faille procéder à la transmission de la déclaration à bref délai après le dépôt de la demande de brevet. C’est du reste ce qui semble avoir été prévu par le législateur, puisque qu’il est indiqué que l’Institut national de la propriété industrielle procède aux démarches normales de l’examen de la demande de brevet et à l’attribution d’une date de dépôt et transmet les informations sans examen à l’autorité compétente. De plus, dans l’introduction du projet de loi à l’origine de la loi biodiversité, il était indiqué que l’objet de cette disposition était de prévoir un « point de contrôle », c’est-à-dire un moment clef dans une chaîne d’utilisation de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées (réception d’un financement public, dépôt d’une demande de brevet, mise sur le marché).
Toutefois, le modèle de déclaration qu’il convient d’utiliser n’est adapté qu’à une déclaration au stade du développement final d’un produit. En particulier, le point 3. du formulaire, « la déclaration est faite à l’occasion de l’évènement suivant », ne prévoit pas le cas du dépôt d’une demande de brevet et ne vise que des évènements relatifs à une mise sur le marché ou une vente.
Or, le dépôt d’une demande de brevet est généralement effectué en amont du stade de développement final de l’objet de cette demande.
Ainsi, en pratique, il sera bien souvent malaisé pour le déposant d’une demande de brevet de remplir le modèle de déclaration à bref délai après le dépôt de la demande de brevet.
Cette difficulté provient selon nous du fait que le projet de loi a été déposé alors que le règlement (UE) n°511/2014 n’était lui-même également qu’à l’état de projet et que de multiples points de contrôle qui ont pu être envisagés lors de la préparation de ce règlement, notamment le dépôt d’une demande de brevet, n’ont finalement pas été retenus dans la version définitive du règlement, qui ne vise plus que la transmission d’une déclaration lors de la réception d’un financement et au stade de développement final d’un produit. Autrement dit, l’obligation de déclaration auprès de l’INPI prévue par le législateur français semble aller au-delà de ce qui est requis par le règlement dans sa version définitive.
Il est donc bien difficile, en l’état, de savoir s’il convient de procéder à la déclaration auprès de l’INPI au moment du dépôt de la demande de brevet ou plus tard, lors des préparatifs de mise sur le marché, même si la deuxième possibilité semble être plus en accord avec le règlement (UE) n°511/2014. Il faut espérer que ce point sera clarifié rapidement.
2. Le deuxième commentaire concerne le type de demandes de brevet visées par l’Article L. 412-18 du Code de l’environnement.
S’agit-il uniquement des demandes de brevet en France, ou cela couvre t’il tout type de demande de brevet, notamment les demandes de brevet européen ou les demandes internationales (qui ne sont pas, au sens strict, des demandes de brevets), que sont susceptibles de déposer les utilisateurs de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées ?
En effet, il semble ressortir de la rédaction de l’Article L. 412-18 du Code de l’environnement que le législateur n’a envisagé que les demandes de brevet pour lesquelles l’INPI réalise un examen ou attribue une date de dépôt.
Toutefois, cela semble un peu restrictif au vu de l’objectif de cette disposition qui était de prévoir un point de contrôle dans une chaîne d’utilisation de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées, peu important alors que l’utilisateur choisisse une protection en France ou dans d’autres pays.
On pourra donc privilégier, par sécurité et en attendant une éventuelle clarification, la transmission de la déclaration pour tout type de demande de brevet ou internationale, et non seulement pour les demandes de brevet en France.
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